© Cédrick Eymenier 1999-2024
L’image est au cœur du travail de Cédrick Eymenier, décisive de sa méthode et de sa plastique. Elle l’engage selon trois axes : Photographie, film, son.
La photographie, pratique la plus élaborée, n’est ni illustrative, ni narrative. L’image n’est pas spectaculaire et n’a pas de valeur thématique. Frontale, impersonnelle, formalisée par le traitement informatique, elle a une fonction d’enregistrement, dont le registre est la réalité urbaine, banale, répétitive, codifiée.
Instrumentale, l’image recoupe l’instrumentalisation d’un monde saturé d’images. Déictique, la saisie photographique indexe la saisie du monde dans un répertoire anonyme de vues, de villes, de rues, de sites, dont la collection, stock ou accumulation d’indices, incrimine et questionne physiquement les relations de l’image au monde.
Que faire, que dire des images dont la prolifération met en coupe et en suspend toute image du monde ?
L’intérêt du travail est de suspendre l’évidence identitaire des images à un vide référentiel auquel donne corps symboliquement leur accumulation. Désœuvrement illimité ou réserve d’une œuvre en puissance, la compilations des images instruit la problématique décisive des logiques de l’art, celle de l’exposition.
Où, quand, comment des images deviennent-elles, dans leur coupure, des exposants du monde ? la question vise l’invention d’un langage, une poétique interne à l’arrangement et à l’espacement sériels des images.
Les « prises de vue » sont à remettre en vue pour ce qu’elles donnent à voir ici et maintenant, dans l’ouverture et la clôture d’un espace et d’un temps d’exposition, comme autant d’artifices dont il reste à jouer la fiction qui les articule et les expose à nouveau au jeu du monde.
René Denizot